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Mon premier combat

September 17, 20249 min read

À ce moment précis, je peux dire que le stress est à son comble. Je suis dans le vestiaire, je me suis échauffé. Malgré l'entraînement intense que j'ai suivi – des centaines de squats, de la course, des rounds de sac, etc. – chaque effort pendant l’échauffement me demande plus d’énergie que prévu. Mais bon, ce n’est pas grave, je continue.

C’est la première fois de ma vie que je ressens ces sensations. J’ai souvent participé à des tournois ou des finales de hockey, mais on affrontait ces situations en groupe, en équipe. Là, je vais être seul face à un adversaire que je ne connais pas et que je n’ai jamais vu. Il a déjà trois victoires à son actif.

Je ne me concentre pas sur lui. Mon coach et moi travaillons sur ce que je vais faire en entrant dans le ring, sur ma première combinaison, etc. Mes premiers mouvements sont déjà planifiés, et je garde mon attention uniquement sur ça.

Plusieurs de mes partenaires ont perdu plus tôt dans le gala, ce qui accentue quelque peu mon stress. Cependant, mon ami Marc-André, qui disputait lui aussi son premier combat, a réussi à décrocher la victoire.

Ça y est, c’est le moment, c’est mon tour.

Le gala se déroule au Colisée Isabelle Brasseur à Saint-Jean-sur-Richelieu. Avant le début, je me suis promené un peu dans les gradins, et je sais que plusieurs de mes amis, connaissances et membres de ma famille sont présents. Je veux faire de mon mieux et leur montrer le fruit de mes efforts.

J’ai 15 ans à l’époque, et honnêtement, en marchant vers le ring pour mon tout premier combat, je n’ai aucune idée de ce qui m’attend ou de la façon dont cela va se dérouler. Il y a des milliers de personnes dans les gradins, prêtes à encourager les deux guerriers qui vont monter sur le ring.

Je suis le boxeur local, et la foule m’accueille chaleureusement.

Le sentiment de monter dans le ring est indescriptible. Mes jambes sont molles, et je regarde mon adversaire. Il est plus grand que moi. À ce moment-là, et encore aujourd’hui, je ne crois pas avoir vécu un moment aussi stressant.

Je me dirige vers le centre du ring.

L’arbitre nous donne les instructions.

On se cogne les gants.

Je retourne dans mon coin.

Je tape dans les mains de mes deux coachs.

Je me retourne à nouveau.

L’arbitre est au centre et regarde les pugilistes.

Mon adversaire est prêt.

La cloche sonne.

C’est parti !


SIX MOIS PLUS TÔT

Je suis chez moi, et je viens d'être rétrogradé au hockey. Je suis vraiment déçu, car à l'époque, je pensais avoir mérité ma place dans le groupe auquel je voulais appartenir.

Mais le destin en a décidé autrement. Et au final, je crois que rien n’arrive par hasard, car cela m’a ouvert un éventail d’opportunités que je n’aurais probablement jamais découvert.

J'avais joué plusieurs années au niveau compétitif, et là, je me retrouvais dans un niveau plus bas. Cela signifiait moins de pratiques et moins d'encadrement.

Pour moi, ce n’était pas suffisant. Il me fallait quelque chose de plus. Cette même année, j'avais vu un combat d’Éric Lucas contre Markus Beyer. Ce n’était peut-être pas son meilleur combat, mais la boxe venait de piquer ma curiosité.

Avec beaucoup moins d'entraînements au hockey, je voulais m’investir davantage ailleurs. Alors, un ami et moi avons décidé de nous inscrire à des cours de boxe.

Je me souviens encore de mon premier cours. Nous arrivons avec mon ami, on pratique des combinaisons, on fait des push-up et des abdos. Je ne me souviens plus de la durée exacte de la séance, mais je me rappelle avoir été totalement épuisé après.

De retour chez moi, je me souviens à quel point c’était difficile. Nous mangions de la soupe, et j’avais tellement de mal à lever ma cuillère que je devais amener ma bouche à la cuillère plutôt que la cuillère a ma bouche.

Malgré l’intensité de la séance, c’était fait : j'avais attrapé la piqure de la boxe.

Lors du match de hockey suivant, mon ami avec qui j’avais commencé la boxe s'est gravement blessé à la clavicule. Il lui était impossible de continuer les cours de boxe avec moi.

Ce n’était pas grave. J’étais déterminé à continuer.

Lors de mon deuxième cours, le coach était différent. Le premier coach avait été mis dehors parce qu'il ne se présentait pas toujours à ses cours.

Le nouveau coach ressemblait à Éric Lucas. Il est maintenant devenu un ami, c’était Frédérique Leblanc.

Initialement, je m’étais inscrit à la boxe parce que j’avais besoin de bouger davantage.

À cette époque, Je faisais de l'haltérophilie le matin à l’école, je jouais au hockey, et maintenant je m’entraînais à la boxe.

J'avais un certain talent pour la boxe, probablement quelque chose en moi que j’avais besoin d’extérioriser. Je crois qu’il faut avoir un petit quelque chose, un besoin d’exprimer des émotions plus négatives, et de les canaliser de manière encadrée, dans un sport structuré.

Je dois vous dire qu'à l'époque, les entraînements de boxe étaient bien différents. Ceux qui cherchaient de l'intensité, des entraînements où l'on repousse ses limites à chaque fois, se tournaient souvent vers la boxe.

C'était considéré comme l'un des entraînements les plus difficiles dans le monde du sport à cette époque.

Pour moi, j'adorais ça.

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La boxe était bien plus qu'un simple sport : elle me permettait de forger mon identité. Cela demandait de la résilience, de la persévérance, et un mental d’acier.

J’ai développé une multitude d’outils mentaux durant cette période, qui me servent encore aujourd'hui. Cependant, à l'époque, je ne me rendais pas compte que je les développais. Ce n'est que plus tard, à l’université, dans mes cours de psychologie sportive, que j'ai pris conscience de tous les éléments nécessaires pour monter dans un ring.

D’ailleurs, il n’a pas fallu longtemps avant que mon coach me suggère de faire du sparring. Pour moi, il n’y avait pas de question à se poser. À l'époque, on ne faisait pas de distinction entre boxe récréative et compétitive. Il y avait juste la boxe, et parfois, dans les cours, on montait dans le ring.

Parfait, je suis monté dans le ring et j’ai adoré. Il n’y a rien comme la boxe. Rien ne demande autant d'effort, à la fois physiquement et mentalement. C’est comme une partie d’échecs, où chaque risque que l’on prend pour toucher son adversaire peut nous coûter un coup en retour.

Ne vous méprenez pas, je n’ai jamais aimé recevoir des coups au visage, mais j’ai adoré la boxe. Ce n'est pas à cause des coups reçus, c’est l'adrénaline, le frisson que ça procure, et le sentiment de satisfaction une fois que tout est terminé.

Je n'ai jamais ressenti quelque chose de comparable à cela !


Revenons à mon premier combat.

Lorsque je suis dans le ring, je peux dire que je suis dans une forme exceptionnelle. À ce moment-là de ma vie, je n'avais jamais été aussi en forme.

La cloche sone j’avance vers mon adversaire.

J’applique ma première combinaison préparée. Ça fonctionne relativement bien, car mon coach me faisait boxer en ambidextre, ce qui était assez rare à l'époque. Après la première combinaison je sens soudainement que je n’ai plus de jambes. Pourtant, à l'entraînement, je pouvais faire 500 squats d’affilée sans problème. Mais là, sur le ring, mes jambes me lâchent. C’est mon conditionnement physique et ma résilience qui me maintiennent en action, mais chaque coup me vide de mon énergie à cause du stress.

Malgré tout, je n’arrête pas. Je touche mon adversaire avec autorité, et cela l’affecte. Je mets beaucoup de pression, et même si je sens mon énergie diminuer, je continue. C’est l’adrénaline qui me pousse à persévérer.

Ce que je peux dire aujourd'hui, c'est que le conditionnement physique en boxe ne devrait jamais être un facteur limitant. Si la fatigue t'empêche d'exécuter correctement les mouvements techniques nécessaires, tu t'exposes à des opportunités pour ton adversaire.

À l'époque, mon coach était d'une autre génération. Il nous faisait travailler très dur, plus dur que les autres, et cela se voyait dans le ring. J'étais souvent plus en forme que mes adversaires, et c'était difficile pour eux de tenir le rythme pendant les trois rounds.

Le premier round, c'est surtout une question d'instinct. Il est passé comme un éclair, et je ne peux pas vraiment décrire tout ce qui s'est passé.

De retour dans mon coin, mon coach reçoit le pointage : je suis en avance. Il me donne quelques directives.

Ding ding, c'est reparti. Je continue de mettre la pression, je le touche encore avec autorité. Il parvient à me toucher avec un coup franc, qui ne m'affecte pas trop, mais étant donné que c’est mon premier combat, l'arbitre décide de nous séparer et de me donner un compte de 8. Je ne sais pas trop quoi faire, je suis perdu dans le ring, et l'arbitre continue de compter. Je veux reprendre, puis je lève enfin les mains. Ah, c'était ça qu'il fallait faire. L'arbitre s'écarte et je peux continuer.

Je m'approche de mon adversaire. Il me lance un jab mou, et bam, je réplique avec un "overhand" bien appuyé, en transférant tout mon poids. Ses genoux fléchissent. À son tour, il reçoit un compte de 8.

Dès que l'action reprend, je mets encore plus de pression, touchant avec force.

Il essaie de me pousser contre les cordes, de prendre l'initiative. Je recule, et – vous vous rappelez que je boxe des deux côtés, à l'époque – je change de côté, ce qui crée une ouverture pour ma main arrière, et je frappe avec tout mon poids.

Il reçoit un deuxième compte de 8. Pendant ce compte, il décide d'en rester là. Victoire par arrêt au deuxième round.

À cet instant, le sentiment d'accomplissement, de fierté, de joie... tous ces efforts enfin récompensés. La boxe ne ment pas. Si tu fais des raccourcis à l'entraînement, la boxe te le rappellera de façon brutale. Si tu travailles dur, elle te récompensera.

Cela fait plus de 20 ans, mais je vous le décris comme si c'était hier.

Cette expérience m'a marqué à jamais. Elle fait partie de mon identité.

J'ai rencontré ma conjointe grâce à la boxe, et aujourd'hui, nous avons un merveilleux petit garçon.

J'ai commencé à coacher grâce à la boxe, et je suis maintenant propriétaire d'un centre d'entraînement fonctionnel et copropriétaire d'un gym de boxe.

Je suis quelqu’un de travailleur, persévérant, prêt à encaisser des coups et à continuer d’avancer (comme dans le discours de Rocky).

La boxe m’a transformé, et elle fera toujours partie de moi.

Coach P-L

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